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Binchy and her hobbies
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22 février 2012

HOMMAGE AU TRICOT...

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Hommage sur le tricot que je viens de lire chez Guillette :
(MERCI pour ce partage)

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[Je sais pour l’avoir pratiqué quelque temps et en avoir observé les effets sur moi que le tricot est un passe-temps d’aliéné.

Il est assez comparable à une drogue. On a des crises de tricot, on peut ressentir un véritable manque si l’on dispose d’une heure libre pendant laquelle on aurait pu s’y adonner et qu’on a négligé de le prendre avec soi, il provoque une pernicieuse accoutumance.

On s’habitue vite au confort d’être à la fois là et absent, protégé par la barrière infranchissable des aiguilles et du rideau de petits points qui pend entre soi et les autres.

Avec l’alibi en or d’être « utile », il est une magnifique excuse pour ne pas participer à la vie environnante et il permet de retarder assez longtemps le moment de rejoindre ceux qui vous y appellent.

« Attends, je finis mon rang...

Or on sait bien que lorsqu’on en a fini un, rien n’est plus facile que d’en commencer un autre, quasiment par inadvertance. En période de crise grave on ne s’aperçoit même pas, ça se fait tout seul. Une bienheureuse amnésie s’abat d’elle-même sur vous entre les derniers points du rang qu’on vient de finir et les premiers de celui qui a été commencé.

« Attends, je finis celui-là… »

Les justifications ne manquent pas – on est au milieu d’un motif, c’est le dernier rang des côtes, on arrive aux diminutions des emmanchures…

« Attends, je fais l’autre côté sinon je ne sais plus où j’en suis… »

Au cinquième, sixième rang commencé, les proches qui attendent – pour sortir ou pour dîner – peuvent à juste titre prendre cette inertie active pour une provocation ou une marque d’hostilité.

Si on lui en fait la remarque, la tricoteuse lève de son ouvrage un regard où se lit la plus grande surprise, un regard « loin de tout ça » très doux et légèrement embué, preuve de sa totale innocence. Elle est la plupart du temps sincère, on tricote rarement contre les autres mais bien plutôt pour son propre soulagement.

Car le tricot est un puissant anesthésique. Au stade inférieur du besoin d’anesthésie il y a le tricot uni, à un point simple et répétitif. Vu de l’extérieur celui-ci semble le plus abrutissant, le tricot « bête » - c’est faux. Les mains occupées à un mouvement machinal, la tête peut se laisser aller librement à des rêveries et il est difficile de couper tout à fait le contact avec l’extérieur.

Les points compliqués, les couleurs multiples me semblent relever d’un stade beaucoup plus grave de l’aliénation volontaire. A haute dose, et sous couvert d’une création plus artistique, on peut être littéralement shooté au jacquard, Et on ne peut pas déranger quelqu’un incessamment occupé à compter ses mailles pour ne pas faire d’erreur. Les proches s’abstiennent vite de toute intervention.

« Bon, ça y est, tu m’as fait louper un point, je suis obligée de recommencer mon rang… »

En cas de grand motif décoratif s’étalant sur tout un devant ou mieux sur le tricot entier manches comprises, l’écran entre soi et les autres est à peu près parfait. L’écran entre soi et soi aussi… Aux prises avec un nombre de mailles qui change tout le temps on ne peut même plus rêver.

Et bien protégé, les yeux, les mains et le cerveau occupés, point à point, rang après rang, on s’abîme dans une léthargie hypnotique, refermé sur soi dans son coin, on tricote pour ceux que l’on aime, et que l’on ne peut pendant toutes ces heures ni toucher ni écouter.

Puis la chose achevée on les regarde partir, au travail où à l’école, couverts, enrobés de cette petite masse de tendresse impuissante nouée maille après maille.

Alors de nouveau les mains vides et l’esprit inquiet il ne reste plus qu’à commencer un autre tricot.

Tricoter pour ses proches est une compensation à un sentiment d’impuissance et d’inutilité – du moins c’est ce que je pense.

 

 Anny DUPEREY
« Le voile noir »]

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Commentaires
B
je me retrouve dans ce texte, toujours un ouvrage en main depuis un certain temps<br /> <br /> de plus je ne sais plus combien de fois j'ai dit attends je fini mon rang<br /> <br /> bon week end, moi je fais une pause bloguerie un mois que Béatrice est partie, je r'ouvrirai certainement un autre blog n'étant plus a l'aise, surtout que ma vie est entrain de changer<br /> <br /> bisous
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A
j'adore ..... je fais suivre ton article il est trop chouette
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M
Un bel hommage signé Anny Duperey !!!
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M
C'est joliment dit et pensé. Oui, ç'est un très bel hommage en effet. Bonne fin de semaine. Gros bisous.
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L
Merci pour ce post et pour cet hommage au tricot tellement bien vu.. <br /> <br /> Bon tricot à toute !<br /> <br /> Laurence
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